J'étais au cinéma, pour l'avant-première du nouveau film de Nobuhiko Obayashi. Sur l'écran immense, la caméra suit les pas d'un personnage de dos, dont on ne voit jamais le visage. Il avançait ainsi sur un sentier de campagne un peu boueux, évitant de vielles toiles d'araignées entre les fourrés. Cette zone regorgeait en été de bestioles, et il se réjouissait d'y passer à la fin de l'automne, alors que tout était encore endormi. Quelques chats errants accompagnaient parfois sa route, faisant un bout de chemin à ses côtés avant de s'enfuir dans un buisson. Continuant sa marche, il arrivait ensuite sur un chemin plus étroit, au bord d'un dénivelé.
Une musique orchestrale, à la fois solennelle et lyrique et avec quelques touches de psychédélisme pop commençait à s'élever. Sur un fond blanc teinté de flammes ardentes, il apercevait non loin, à sa droite, une immense colonne de fumée grise dont les cendres emplissaient le ciel de nuages lourds.
Au bout du chemin, la destination du personnage commençait à apparaître : c'était un espace-lumière, comme une fenêtre tressautante dont on ne pouvait déterminer si elle était en deux ou trois dimensions, et sur ou dans laquelle étaient projetés, se superposant, tous ses souvenirs, passés et futurs.
C'était la plus belle chose que j'avais vue de ma vie.
Wednesday, October 16, 2019
18 août 2019 (insomnies)
Je remplaçais le sonneur de cloche d'une église de Marseille. Après quelques coups, je vois en contrebas les voisins excédés par le bruit qui balancent des cailloux sur la cathédrale. L'un d'eux entre dans l'enceinte. J'essaie de m'interposer mais ses amis furibonds entrent à sa suite, et me repoussent violemment. Ils fouillent partout et trouvent le véritable sonneur, recroquevillé dans un coffre en bois dans la réserve. Ils le saisissent alors qu'il hurle, et commencent à le découper vivant. L'homme est hagard de douleur et pris de ricanements déments. On lui met une tranche de sa propre jambe dans la bouche, en lui ordonnant "mange". Il dit "ça a un peu le goût du lonzo". L'agresseur se met ensuite à lui faire lentement déguster ses tripes.
Immobilisé, je suis obligé de regarder.
Immobilisé, je suis obligé de regarder.
2 août 2019
J'étais hébergé dans une banlieue pavillonnaire chez une amie, dont le père était excessivement jovial et mielleux en compagnie des copines de sa plus jeune fille adolescente. Il avait des airs de Leland Palmer très très obséquieux. Je trouvais des photographies qu'il avait imprimées d'après les
pages facebook de ces gamines. Il y avait eu dans le quartier déjà, quelques disparitions inquiétantes.
Il y avait également deux chats, très désagréables, car grands comme des chiens. L'un d'eux était glabre et n'avait pas d'oreilles. En le caressant, sa peau froide était repoussante. L'autre, ressemblait plutôt à un lévrier au regard mort. Tout le monde semblait me dire que ces créatures étaient des chats, mais j'avais du mal à être convaincu.
Il y avait un troisième chat, plus beau et roux, qui laissait partout des poils qui étaient des filaments d'or.
pages facebook de ces gamines. Il y avait eu dans le quartier déjà, quelques disparitions inquiétantes.
Il y avait également deux chats, très désagréables, car grands comme des chiens. L'un d'eux était glabre et n'avait pas d'oreilles. En le caressant, sa peau froide était repoussante. L'autre, ressemblait plutôt à un lévrier au regard mort. Tout le monde semblait me dire que ces créatures étaient des chats, mais j'avais du mal à être convaincu.
Il y avait un troisième chat, plus beau et roux, qui laissait partout des poils qui étaient des filaments d'or.
20 juillet 2019
Cela fait deux nuits que je rêve de parcs d'attraction abandonnés, ou en désuétude. Aujourd'hui, j'étais dans une sorte d'aqualand, dont la piscine était animée par un show mis en scène par le réalisateur du dernier Star Wars.
Sur l'étendue d'eau se projetait la silhouette géante d'une femme en combinaison de plongée. Un projecteur agrandissait son ombre sur toute la piscine, nous disait-on, pour effrayer le monstre marin qui attendait au fond des eaux où se baignaient les quelques rares touristes. Puis l'actrice plongeait (une jeune star américaine en vogue, mais je ne sais plus qui c'était), armée d'un harpon, et feignait de combattre la créature des profondeurs. Quand elle remontait hors de l'eau, à la lueur du crépuscule, je ne pouvais m'empêcher de lui faire remarquer que ce scénario un peu léger, et elle me lançait un regard compréhensif mais un peu triste à travers sa combinaison... La soirée se terminait autour d'un feu de bois. Nous avions trouvé au bord des bassins quelques anciennes cassettes de projets noise et industriels très confidentiels, que nous écoutions sur un poste miniature...
La nuit d'avant, j'étais avec des amis dans un parc à thème autour de l'oeuvre de Lovecraft, perdu dans la forêt et éloigné de toute activité touristique, au bord de la banqueroute. Une vieille femme tentait de faire survivre le lieu, mais la moitié des attractions étaient arrêtées, comme le grand huit, envahi par la végétation.
Une présence semblait nous suivre, et nous devions fuir à travers les feuillages. A l'extrémité du parc se tenait une immense tour d'allure médiévale. Mes amis refusèrent d'y entrer et j'y montais donc seul, mais il n'y avait dans celle-ci qu'une exposition temporaire sur l'oeuvre de Sôseki. Au dernier étage, dans une petite pièce éclairée à la bougie, se trouvaient la mystérieuse patronne à l'air sombre et renfermé, quelques jeunes gens et un garçon, la trentaine, aux cheveux longs et à l'air mi-asiatique, mi-indien d'Amérique, qui semblait déterminé à finir ses jours dans cette zone reculée. Celui-ci avait quitté Hong-Kong quelques années plus tôt. Il me confia dans un murmure :
"Toutes les voies s'arrêtent ici. Tout sera rattrapé par la rouille."
Sur l'étendue d'eau se projetait la silhouette géante d'une femme en combinaison de plongée. Un projecteur agrandissait son ombre sur toute la piscine, nous disait-on, pour effrayer le monstre marin qui attendait au fond des eaux où se baignaient les quelques rares touristes. Puis l'actrice plongeait (une jeune star américaine en vogue, mais je ne sais plus qui c'était), armée d'un harpon, et feignait de combattre la créature des profondeurs. Quand elle remontait hors de l'eau, à la lueur du crépuscule, je ne pouvais m'empêcher de lui faire remarquer que ce scénario un peu léger, et elle me lançait un regard compréhensif mais un peu triste à travers sa combinaison... La soirée se terminait autour d'un feu de bois. Nous avions trouvé au bord des bassins quelques anciennes cassettes de projets noise et industriels très confidentiels, que nous écoutions sur un poste miniature...
La nuit d'avant, j'étais avec des amis dans un parc à thème autour de l'oeuvre de Lovecraft, perdu dans la forêt et éloigné de toute activité touristique, au bord de la banqueroute. Une vieille femme tentait de faire survivre le lieu, mais la moitié des attractions étaient arrêtées, comme le grand huit, envahi par la végétation.
Une présence semblait nous suivre, et nous devions fuir à travers les feuillages. A l'extrémité du parc se tenait une immense tour d'allure médiévale. Mes amis refusèrent d'y entrer et j'y montais donc seul, mais il n'y avait dans celle-ci qu'une exposition temporaire sur l'oeuvre de Sôseki. Au dernier étage, dans une petite pièce éclairée à la bougie, se trouvaient la mystérieuse patronne à l'air sombre et renfermé, quelques jeunes gens et un garçon, la trentaine, aux cheveux longs et à l'air mi-asiatique, mi-indien d'Amérique, qui semblait déterminé à finir ses jours dans cette zone reculée. Celui-ci avait quitté Hong-Kong quelques années plus tôt. Il me confia dans un murmure :
"Toutes les voies s'arrêtent ici. Tout sera rattrapé par la rouille."
27 juillet 2019
Au bord d'un fleuve saumâtre, dans le quartier chinois d'une grande métropole, envahi de néons, j'errais de nuit à la recherche d'un repas pas cher, et finissais par trouver un soupirail rouillé qui me menait au marché souterrain, où se fournissaient les commerçants.
Là, entre les légumes exotiques et les divers poissons frais, je commençais à me sentir observé et mal à l'aise. Alors que j'étais sur le point de repartir, une sorte de homard translucide, grand comme un berger allemand, émergea lentement d'un aquarium dans un coin de la pièce. Il se dressa debout et commença à avancer vers moi en me fixant. Tous les clients et le personnel me regardaient également. Je remarquai alors que tout mon corps émettait une espèce de lueur phosphorescente.
Là, entre les légumes exotiques et les divers poissons frais, je commençais à me sentir observé et mal à l'aise. Alors que j'étais sur le point de repartir, une sorte de homard translucide, grand comme un berger allemand, émergea lentement d'un aquarium dans un coin de la pièce. Il se dressa debout et commença à avancer vers moi en me fixant. Tous les clients et le personnel me regardaient également. Je remarquai alors que tout mon corps émettait une espèce de lueur phosphorescente.
Friday, October 04, 2019
12 juillet 2019
Nous étions dans une clairière, seulement éclairée par la lune. Debout en face moi, elle me dit d'un air hésitant : "D'ici le 16 du mois, je n'ai pas envisagé le suicide. Mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'une séparation."
Autour de nous, quelques tombes fraîchement creusées. Dans chacune d'elles reposent deux ou trois enfants morts, la peau grisâtre et les yeux blancs.
Lentement, leurs cadavres commencent à bouger.
Ils se saisissent de leurs fusils.
Autour de nous, quelques tombes fraîchement creusées. Dans chacune d'elles reposent deux ou trois enfants morts, la peau grisâtre et les yeux blancs.
Lentement, leurs cadavres commencent à bouger.
Ils se saisissent de leurs fusils.
12 juin 2019
J'étais allé rendre visite à ma soeur qui travaillait pour un an à Mayotte. Mayotte, donc, était une île montagneuse et étroite, dans les régions froides du nord tout près du grand continent polaire qui englobait la Scandinavie, non loin des côtes de la Belgique et du Canada.
Nous étions allés visiter les grandes rivières souterraines. L'île était parfois prise de secousses, et au fond de ces canaux, dans les fondations de l'île, se trouvaient les fissures sismiques qui annoncent un désastre prochain (mais imprévisible), connu de tous les habitants sous le nom de "grande convergence".
Pas très loin de nous, un yuppie en costard s'était fait accompagner dans les eaux par deux entrepreneurs new-age, et semblait extatique après ce voyage au coeur de la terre, transformé par une sorte de connaissance mystique qu'il croyait y avoir acquise. Ses guides comptaient les billets avec un sourire moqueur.
De retour à l'appartement, je me fais réveiller par ma mère qui trouve que je me lève trop tard. Je grommelle, mais il est en effet 16h45. Nous sortons tous manger un morceau, il y a dans les ruelles proches un syrien qui vend de la street-food asiatique, et un délicieux poulet grillé aux épices.
La ville est à la fois petite et cosmopolite, de vieilles demeures de pierre à flanc de roche et des petites rues pleines de touristes. En contrebas, nous nous dirigeons vers le métro. L'air est glacial et les bourrasques de vent glacé nous projettent à terre. Il y a de grands tubes de tissu qui flottent et servent de couloirs pour l'un des transports locaux, de simples wagons de bois propulsés par le vent.
J'essaie de repenser à la convergence, et à ce que nous avons vu dans les souterrains, mais je n'ai aucun souvenir de la fin de la journée. Tout est comme dans un rêve.
Suivant la côte, nous prenons le train pour aller visiter une autre partie de l'île. Par la fenêtre défilent d'immenses champs de petites fleurs rouges, poussant en grappes (des achilés ?). Je contemple le paysage, tentant de graver ces images dans ma mémoire, mais elles s'enfuient plus vite que le mouvement du train. Je n'arrive à me souvenir de rien.
Nous étions allés visiter les grandes rivières souterraines. L'île était parfois prise de secousses, et au fond de ces canaux, dans les fondations de l'île, se trouvaient les fissures sismiques qui annoncent un désastre prochain (mais imprévisible), connu de tous les habitants sous le nom de "grande convergence".
Pas très loin de nous, un yuppie en costard s'était fait accompagner dans les eaux par deux entrepreneurs new-age, et semblait extatique après ce voyage au coeur de la terre, transformé par une sorte de connaissance mystique qu'il croyait y avoir acquise. Ses guides comptaient les billets avec un sourire moqueur.
De retour à l'appartement, je me fais réveiller par ma mère qui trouve que je me lève trop tard. Je grommelle, mais il est en effet 16h45. Nous sortons tous manger un morceau, il y a dans les ruelles proches un syrien qui vend de la street-food asiatique, et un délicieux poulet grillé aux épices.
La ville est à la fois petite et cosmopolite, de vieilles demeures de pierre à flanc de roche et des petites rues pleines de touristes. En contrebas, nous nous dirigeons vers le métro. L'air est glacial et les bourrasques de vent glacé nous projettent à terre. Il y a de grands tubes de tissu qui flottent et servent de couloirs pour l'un des transports locaux, de simples wagons de bois propulsés par le vent.
J'essaie de repenser à la convergence, et à ce que nous avons vu dans les souterrains, mais je n'ai aucun souvenir de la fin de la journée. Tout est comme dans un rêve.
Suivant la côte, nous prenons le train pour aller visiter une autre partie de l'île. Par la fenêtre défilent d'immenses champs de petites fleurs rouges, poussant en grappes (des achilés ?). Je contemple le paysage, tentant de graver ces images dans ma mémoire, mais elles s'enfuient plus vite que le mouvement du train. Je n'arrive à me souvenir de rien.
29 mai 2019
Je vivais dans une sorte de squat, ou résidence universitaire, un bâtiment délabré en forme de U, ancien hôpital pendant la guerre.
Un escalier pliable menait à ma chambre, mais en arrivant, je le retrouve bloqué. D'autres occupants avaient déplacé en-dessous une gazinière. L'étage était inaccessible, l'escalier de bois et les murs couverts de graisse.
Je m'aperçois que les chambres sont presque désertes. Ne reste que le concierge dans une petite pièce, derrière sa porte bien fermée. Il me demande ce que je fais là, m'informe que l'immeuble a été vidé pour "l'exercice" : derrière les vitres, dans la cour intérieure, il y a des soldats et des scientifiques à l'air bêtement réjoui. Ils testent un nouveau projectile, un missile nucléaire de tout petit calibre. Personne n'a de protections. "Ce n'est qu'un tout petit missile" ricane un général frondeur et satisfait.
Les tirs commencent sur une muraille dressée dans la cour, devant lequel sont posés des mannequins. Le concierge et moi, et deux ou trois autres égarés, nous tenons bien à l'abri derrière des murs épais. Les mannequins explosent, les militaires ont l'air ravis. Tous célèbrent leur succès puis l'un des ingénieurs regarde son compteur Geiger, dont les chiffres ne cessent de monter. Son sourire s'efface.
Un peu plus tôt, je visitais la fac pour la première fois, dans une campagne boisée près de Kamakura, et j'y retrouvais une amie. Nous bavardions en nous rendant au réfectoire.
"Je crois que je préférais Paris, me dit-elle. A chaque soirée, dans mes bars ou mes cafés, je retrouvais des amis où que j'aille. C'est si différent..."
"Tu plaisantes, répondis-je, tout le monde vient ici. Rien que sur notre trajet, j'ai aperçu trois de mes anciennes amantes, ou peut-être quatre du coup, avec toi. L'une d'elles est morte l'an dernier."
Un escalier pliable menait à ma chambre, mais en arrivant, je le retrouve bloqué. D'autres occupants avaient déplacé en-dessous une gazinière. L'étage était inaccessible, l'escalier de bois et les murs couverts de graisse.
Je m'aperçois que les chambres sont presque désertes. Ne reste que le concierge dans une petite pièce, derrière sa porte bien fermée. Il me demande ce que je fais là, m'informe que l'immeuble a été vidé pour "l'exercice" : derrière les vitres, dans la cour intérieure, il y a des soldats et des scientifiques à l'air bêtement réjoui. Ils testent un nouveau projectile, un missile nucléaire de tout petit calibre. Personne n'a de protections. "Ce n'est qu'un tout petit missile" ricane un général frondeur et satisfait.
Les tirs commencent sur une muraille dressée dans la cour, devant lequel sont posés des mannequins. Le concierge et moi, et deux ou trois autres égarés, nous tenons bien à l'abri derrière des murs épais. Les mannequins explosent, les militaires ont l'air ravis. Tous célèbrent leur succès puis l'un des ingénieurs regarde son compteur Geiger, dont les chiffres ne cessent de monter. Son sourire s'efface.
Un peu plus tôt, je visitais la fac pour la première fois, dans une campagne boisée près de Kamakura, et j'y retrouvais une amie. Nous bavardions en nous rendant au réfectoire.
"Je crois que je préférais Paris, me dit-elle. A chaque soirée, dans mes bars ou mes cafés, je retrouvais des amis où que j'aille. C'est si différent..."
"Tu plaisantes, répondis-je, tout le monde vient ici. Rien que sur notre trajet, j'ai aperçu trois de mes anciennes amantes, ou peut-être quatre du coup, avec toi. L'une d'elles est morte l'an dernier."
27 avril 2019
Un monde de zones industrielles péri-urbaines, où des poches de résistance autonomes s'organisaient autour de skate parks, reliés par des rampes de glisse qui s'enfoncent dans le sol pour former des tunnels clandestins. L'un de ceux-ci avait été découvert par la milice fasciste, et ils m'escortaient dans les couloirs sombres vers un recoin souillé de sang. Des images mentales resurgissent, d'une exécution à coups de tournevis tranchant, une énucléation. Je ne sais plus si je faisais partie des victimes ou des bourreaux.
31 janvier 2019
Le monde était devenu une immense zone de trafic inter-urbain, mais sans villes, des paysages déserts de routes, ponts et rampes qui se chevauchent ; les herbes et buissons émergeant entre les voies.
Depuis l'espace, j'avais vu le globe perdre progressivement sa verdure : tout n'était plus qu'un réseau de nodes, chacun marqué par une réplique de la statue de Hachikô.
Pour se déplacer à la surface, il fallait donc traverser des couloirs de camions, des convois interminables dont les wagons reliés entre eux menaçaient à chaque instant de vous broyer au moindre virage contre une des colonnes de béton qui supportaient les rampes de bitume superposées.
Je suis donc ici, entre les bolides, et pour échapper à l'un d'eux qui s'apprête à m'enserrer comme un serpent, je n'ai d'autre choix que de bondir par dessus un talus entre deux voies. Quelques bosquets malingres ont poussé là, et l'espace qui les surplombe est recouvert d'un filet translucide, une dense toile d'araignée qui masque tout sur plusieurs mètres comme une brume diffuse.
Derrière moi, le camion se rapproche. Je balaie autant que possible devant moi avec une branche, et saute au dernier moment.
Alors que je flotte encore dans les airs, je sens la toile qui m'enserre au niveau du cou et m'étrangle, comme un foulard de gaze blanc où d'innombrables points noirs grouillent et s'agitent.
Depuis l'espace, j'avais vu le globe perdre progressivement sa verdure : tout n'était plus qu'un réseau de nodes, chacun marqué par une réplique de la statue de Hachikô.
Pour se déplacer à la surface, il fallait donc traverser des couloirs de camions, des convois interminables dont les wagons reliés entre eux menaçaient à chaque instant de vous broyer au moindre virage contre une des colonnes de béton qui supportaient les rampes de bitume superposées.
Je suis donc ici, entre les bolides, et pour échapper à l'un d'eux qui s'apprête à m'enserrer comme un serpent, je n'ai d'autre choix que de bondir par dessus un talus entre deux voies. Quelques bosquets malingres ont poussé là, et l'espace qui les surplombe est recouvert d'un filet translucide, une dense toile d'araignée qui masque tout sur plusieurs mètres comme une brume diffuse.
Derrière moi, le camion se rapproche. Je balaie autant que possible devant moi avec une branche, et saute au dernier moment.
Alors que je flotte encore dans les airs, je sens la toile qui m'enserre au niveau du cou et m'étrangle, comme un foulard de gaze blanc où d'innombrables points noirs grouillent et s'agitent.
Deux nuits, deux réveils tremblants. (? janvier 2019)
Je suis dans une université au Japon, un ensemble d'immeubles modernes, avec de grandes salles cerclées de parois de verre. Dans l'une d'elles, j'aperçois une amie qui semble s'appliquer de façon très studieuse. J'essaie de capter son regard pour la distraire, mais elle est trop concentrée.
Un grondement sourd se fait alors entendre, et une pulsation unique dont la vibration traverse tout le bâtiment et s'intensifie. Il y a eu un éclair, et je vois par les fenêtres, non loin, s'élever l'immense colonne de fumée typique qui prend peu à peu sa forme de champignon sur un ciel rougi. Tout le monde se presse vers les ascenseurs et les escaliers, sans grand espoir. J'ai à peine le temps de me demander "Qui a pu lancer la bombe, cette fois-ci ?". Des blocs de béton commencent à se détacher du plafond et s'écrasent autour de moi.
Une espèce d'institution, entre l'asile et la maison de retraite. Le personnel est constitué de femmes et de quelques hommes travestis et exagérément maquillés. Je suis parmi les patients, en robe de malade (un peu plus tôt j'ai croisé mon chat, mais il ne m'a pas reconnu), et tous traînent dans les couloirs avec un regard vide. Je fais de même, car il ne faut surtout pas se faire remarquer. Une infirmière nous arrête, pour contrôler notre traitement. Je comprends qu'il s'agit de vérifier que nous sommes bien tous amorphes et dénués de pensée consciente, insensibles à tout stimulus. Je joue la comédie, feignant l'apathie mais l'examinatrice nous pique à divers endroits avec une longue aiguille. Malgré mes efforts, mon regard me trahit. "Il faut, dit la soignante, câbler celui-ci", et elle commence à poser sur mon corps un appareillage censé provoquer la catatonie : une sonde reliée à la moelle épinière - un tube au genou, qui injecte un liquide à travers le cartilage. En panique, je renverse les équipements et cours de toutes mes forces dans les couloirs pour m'enfuir. Il ne semble pas y avoir de sortie.
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